Marie TILLARD est une artiste généreuse et enthousiaste. Elle a exploré diverses expressions artistiques et se définit elle-même comme artiste peintre. A Paris, son premier medium, la photographie, l’amène à inventer son « processus créatif » : le marouflage de ses photos sur des toiles. Vidéaste, sculptrice sur bois elle a récemment inventé une nouvelle forme de création artistique qu’elle a appelée les « Jardins de matières », assemblages de matières minérales ou non. Elle a ainsi créé plusieurs « jardins » à la demande de municipalités et de particuliers.

Les ateliers ou comment révéler les talents artistiques de chacun

Mais Marie qui a acquis un atelier où elle expose ses œuvres souhaite faire partager ses passions artistiques. C’est ainsi qu’elle est amenée à animer peu à peu des ateliers dans la plupart des écoles, lycées, centres de loisirs de Saintes et des environs, ainsi qu’aux Beaux Arts de La Rochelle. « Chaque personne est unique et chaque personne a un talent, à moi petit à petit de le révéler ». Puis, il y a dix ans, elle accepte de monter un projet pour l’ouverture d’un atelier dans la Maison d’arrêt de Saintes.

L’Art en prison

A l’origine c’est Robert Badinter en 1981 qui a dit qu’il fallait amener l’Art dans les prisons. Avant de commencer, Marie souhaite visiter les lieux afin de les « ressentir pour s’en inspirer et dégager les mauvaises énergies qui peuvent circuler ». Ainsi, en abordant les personnes avec respect, celles-ci peuvent-elles peu à peu s’ouvrir et se libérer. Les détenus en confiance font preuve d’une imagination et d’une créativité intense. Marie dit qu’ils en oublient le milieu carcéral et ont l’impression de s’en évader. « Ce qui se passe à l’intérieur d’une prison est d’une force et d’une puissance qu’il n’y a pas dans les autres ateliers, parce qu’on est vraiment au cœur de l’humanité, au cœur de l’humain ». A la fin, chaque projet d’atelier débouche sur une exposition, à l’intérieur de la prison et à l’extérieur. Artiste reconnue, Marie obtient l’accord des Musées de la région pour exposer les œuvres des détenus.

Le regard du public

L’importance de montrer ces œuvres au public est de changer son regard et de lui permettre de dépasser ses peurs, car la seule représentation qu’il a de la prison est celle que lui montrent les séries télé et les films. Ce qu’il en retient c’est la violence. Lors des expositions, le public est ému. L’adjoint à la Culture de la ville, à la vue de ces œuvres a dit : « Ça c’est le travail de détenus ? Ça il faut le montrer ! » Ainsi le public est-il curieux de voir ces tableaux et il est étonné par l’humanité qui s’en dégage. Le fait d’être touché par des hommes qui sont en prison l’amène à une vraie réflexion et son regard change.

Effets de l’Art sur les détenus

Petit à petit ça devient leur fierté, ils gardent leurs peintures, ils disent : « moi, j’ai fait ça ! » et en fait ils se surprennent eux-mêmes ! Et surtout, ils se redressent physiquement, au fur et à mesure il y a une dignité qui revient. Les détenus sont très heureux de pouvoir montrer que la prison ce n’est pas que du mauvais, que du négatif, car c’est aussi un lieu où l’on peut se reconstruire, car il leur faut remplir ces années de détention.

Effet des ateliers sur l’artiste-intervenante

L’artiste-intervenant doit se sentir bien dans le lieu carcéral, parce qu’il est d’une austérité incroyable. L’important c’est ce qui se passe entre lui et les détenus, «  c’est leurs toiles et ce qu’ils mettent dessus ! » Cela fait dix ans à présent que Marie anime des ateliers en prison. Elle dit que cela l’a amenée à évoluer dans sa manière de transmettre son art. Elle est devenue enseignante de yoga de Samara et pense associer le yoga et la peinture. « Cette expérience m’a transformée » dit-elle.