Se libérer de la peur de la prison

Brigitte Brami a d’abord passé un peu plus de cinq mois en prison à la suite d’une plainte de son psychanalyste. Elle explique cette incarcération par l’influence qu’exerçait celui-ci auprès des tribunaux.  L’univers carcéral éveillait en elle une certaine peur que chacun d’entre nous peut ressentir face à ce lieu de privation de liberté. Mais dès son arrivée à la Maison d’Arrêt des femmes de Fleury Mérogis ses inquiétudes disparaissent. Elle découvre que l’absence de cette peur permet de rendre la prison caduque. En effet, si la peur d’aller en prison permet de réguler les comportements sociaux, supprimer cette peur conduit à se libérer de l’obligation aux lois. Après avoir effectué sa peine, l’écrivaine est à nouveau condamnée à près de six mois de prison pour les mêmes faits avec la même partie civile. Face à ce qu’elle considère comme une injustice elle part en cavale. Durant ces quelques mois elle vivra dans les milieux « interlopes » de la capitale. Elle transportera avec elle les brouillons qui vont ensuite constituer son ouvrage autobiographique, La prison ruinée.

Une seconde incarcération sous le signe de la violence

Alors que sa première incarcération s’était présentée sous le signe de la découverte et de la sensualité, la seconde est bien différente. Au cours de ce second séjour, elle connaît des agressions physiques et des violences verbales de la part des autres détenues. Les femmes qu’elle avait magnifiées dans son roman montrent ici un autre visage. Brigitte Brami explique cette attitude par la sortie de son livre mais aussi par le fait que La manif pour tous ait réveillé chez les détenues une certaine homophobie. Son attention se porte sur un contraste saisissant : « Lors de mon premier séjour en prison à ma sortie les autres détenues ont crié en cœur  »Libérée ! Libérée ! ». Par la suite, à ma seconde sortie, elles ont crié  »Casse toi Brami! » Il y a une vraie force poétique dans ces réactions opposées et dans cette injonction à la liberté ! » » Malgré cette seconde expérience, elle continue à affirmer son amour pour la prison et n’a aucune crainte à revivre un jour derrière les barreaux. Un second roman autobiographique est aujourd’hui en préparation afin de raconter avec authenticité la suite de La prison ruinée.

Ecrire et lire en prison

Titulaire d’un doctorat de littérature, Brigitte Brami était déjà familiarisée à la pratique de l’écriture. C’est alors tout naturellement qu’au cours de ses périodes d’incarcération, elle poursuit cette démarche créatrice. Aujourd’hui, elle se plaît à se qualifier de « poète voyou et voyant » à l’instar de Jean Genet, Albertine Sarrazin et Rimbaud. La prison représente pour elle un espace permettant d’acquérir une disposition d’esprit propre aux grands poètes. Elle affirme d’ailleurs dans La prison ruinée : « On ne lit bien certaines œuvres qu’en prison. Les plus grandes œuvres littéraires. Recluse dans quelques mètres carré d’une cellule, allongée sur un matelas en mousse, la position du corps, occupant si peu de place dans notre si grand monde, devient posture mentale, voire morale. La détenue rejoint le hors monde dans lequel tout-e écrivain-e digne de ce nom s’est réfugié-e pour travailler. » En se transformant en poète Brigitte Brami a réussi à changer ses conditions carcérales. Elle est l’auteure d’un livre consacré à Jean Genet, intitulé Le miracle de Jean Genet auquel s’ajoute un nouvel ouvrage, Corps imaginaires où au travers de souvenirs marseillais elle décrit deux détenues connues lors de son incarcération.